mercredi 20 juin 2007

Prix Elle pour la Femme en Vert d'Arnaldur Indriðason


La Femme en vert (Grafarþögn) a reçu le Prix Elle des Lectrices dans la catégorie policier le 29 mai de cette année... à la grande satisfaction de l'auteur, de l'éditrice et du traducteur...

mardi 5 juin 2007

Einar Már Guðmundsson, Riddarar hringstigans










Le roman Les chevaliers de l'escalier rond d'Einar Már Guðmundsson est paru chez Gaïa le 31 mai, voici la couverture...


Voici, en version à peine modifiée, le texte de présentation de l'oeuvre et de son auteur que j'ai envoyé à mon éditeur il y a quelques mois :


EINAR MÁR GUÐMUNDSSON

Einar Már Guðmundsson est né à Reykjavík en 1954.
Comme la plupart des écrivains islandais, il commence par publier un recueil de poésie, en 1980. En 1985, pour son premier roman, Les chevaliers de l’escalier rond, (Riddarar hringstigans) il obtient le premier prix d’un concours prestigieux, organisé par la Société littéraire islandaise (Almenna Bókafélagið). En 1995, son roman Les Anges de l’univers (Englar alheimsins) (traduit en français par Catherine Eyjólfsson chez 10/18) reçoit le Prix Littéraire du Conseil des Pays Nordiques, la plus haute récompense décernée annuellement à un écrivain des cinq pays nordiques. Cette œuvre est ensuite adaptée au cinéma par le réalisateur Friðrik Þór Friðriksson et Einar Már en rédige le script. En collaboration avec ce réalisateur, Einar Már a d’ailleurs écrit deux autres scripts.
Einar Már a publié en tout une dizaine de romans, sept recueils de poèmes et deux traductions de Ian McEwan.
Einar Már Guðmundsson est l’un des très grands auteurs islandais du vingtième siècle. Il parle du quotidien en le transfigurant par le biais de mots de tous les jours, c'est-à-dire qu’il se livre à une activité véritablement « poétique » dans le sens étymologique du terme. Comme il le dit lui-même, il tente d’examiner ce que la réalité recèle de magique en même temps que la part de réalité que la magie recèle. Dans ses œuvres, les notions de réel, d’imaginaire et de surnaturel ne sont pas trois pôles détachés les uns des autres, mais elles font, au contraire, partie d’une seule réalité globale.
Jusqu'alors, seul son roman Les anges de l’univers avait été traduit en français : très belle traduction de Catherine Eyjólfsson.



LES CHEVALIERS DE L’ESCALIER ROND


Il s’appellent Jói, Óli, Garðar, Jón, mais il y a aussi tous les autres gamins de ce quartier encore en construction, les parents, les tantes, les oncles, le marchand de jouets, le marchand de hot-dogs, le coiffeur et l'oncle policier.

Jói est un petit garçon de six ou sept ans qui, comme tous les enfants, fait nombre de bêtises. Jói déchire les cahiers d’école de son grand frère car, bien que n’ayant pas l’expérience du système scolaire, il se révolte déjà, par anticipation. Jói descend en courant l’escalier de l’immeuble où il habite et donne un coup de marteau sur la tête d’Óli, son petit voisin, puis il regrette amèrement son geste car Óli annule l’invitation qu’il lui avait lancée pour venir à son anniversaire auquel doit assister son oncle policier et herculéen, le héros du quartier et des pages sportives du Journal du Matin, rien que ça ! Et puis, après tout, ce n’est pas sa faute à lui si son petit voisin a placé sa tête sur le chemin du marteau arrache-clou. C’est la faute de son père qui n’a pas rangé le marteau, la faute du marchand de marteaux, la faute du fabricant…

C’est décidé : Jói ira à l’anniversaire… Il met en place toute une stratégie dans sa tête. Il organisera une manifestation spirituelle en défilant derrière son immeuble, vêtu de son anorak à capuche qui soulignera tragiquement sa solitude et, pour peu qu’il se mette à pleuvoir, la mère d’Óli le prendra en pitié ; il dissuadera les autres gamins de la rue de s’y rendre, il s’arrangera pour manipuler le petit voisin, il passera un pacte avec les poissons de son aquarium qui vont lui venir en aide… Il est malin !

Jói est un enfant qui pense comme un enfant mais s’exprime souvent comme un adulte ou, tout du moins, en singeant les adultes. La logique de ses réflexions est délicieusement farfelue, il interprète la réalité avec les outils intellectuels dont dispose un enfant, de façon drôle, poétique et, si l’on peut dire, magique. Pourquoi les enfants n’ont-ils pas le droit de rester dans la rue à la nuit tombée ? La réponse est simple : leur ennemi numéro un, le Comité de Protection des Enfants et Adolescents a décrété que leurs heures de sortie coïncideraient avec celles de l’allumage des phares des voitures ! Par conséquent, les enfants peuvent rester dehors toute la journée en été mais l’hiver, ils ont à peine le temps de mettre le nez dehors puisqu’il fait presque toujours nuit. Dans le même registre, quel meilleur remède y a-t-il que le café contre les insomnies imaginaires ?!

L’ensemble du roman est écrit à la première personne et c’est Jói qui en est le narrateur. Il s’adresse souvent directement à Óli, apostrophe le lecteur, donne des explications hasardeuses sur bien des choses (l’habillement, les coupes de cheveux, les professions et activités des adultes) et parvient à recréer l’ambiance qui régnait non seulement à Reykjavík mais aussi, probablement dans bien des villes européennes dont les banlieues étaient en cours de construction au début des années soixante. En outre, il nous donne une image psychologiquement juste de la manière dont un enfant perçoit et analyse la réalité. Il s’explique tout, il comprend tout et donc, il nous explique tout ça, nous raconte tout ça de manière séduisante et drôle, dans une histoire ponctuée de passages d’une grande poésie où, comme dans la vraie vie, le tragique a également sa place.